lunes, 27 de abril de 2009

QUESTIONS

1. Choisissez l´une de ces deux chansons "Amoureux de Paname" ou "Dans mon HLM" de Renaud et repérez au moins 5 procédés de formation des mots argotiques.

http://www.youtube.com/watch?v=mlneYuBzKBg

http://www.youtube.com/watch?v=CBdKALAnLpA

2. Transformez le dialogue proposé en français familier au français argotique.

A) Tu as vu la maison de Jean, elle est très belle. Ça se voit qu´il a beaucoup d´argent.

B) Oui, il va aussi acheter une voiture.

A) Franchement, ce garçon a tout ce qu´il veux, toujours des habits, des chaussures, plain d´amis...

B) Et moi, j´ai même pas d´argent pour m´acheter des souliers...

A) Il m´énèrve parfois, il s´en vante beaucoup.

B) Allez, laisse-tomber, on va au cinéma avec les amis de mon frère? On va s´amuser avec eux.

A) Il faudra faire attention à la police si on rentre en voiture, je ne veux pas boire trop et après avoir des problèmes.

B) Ne t´inquiette pas, on va se débrouiller après.

3. Étant présent dans plusieurs domains artistiques comme la chanson ou le cinéma l´argot n´est plus un parler marginal. À votre avis, est-il souhaitable de l´enseigner dans les écoles ou au contraire menace-il la "belle langue française"?

L´ARGOT DANS LA LITTÉRATURE, LA MUSIQUE ET LE CINEMA



1. La littérature beur

Les influences des langues étrangères dans l'argot sont bien évidemment influencées par les origines des immigrants selon l'époque. La littérature "beur", née dans les années 80, est produite en français par des écrivains issus de la seconde génération de l'immigration maghrébine en France.
La langue est l’outil investi par les beurs pour se distinguer des autres écrivains, elle permet de communiquer aux lecteurs le flottement culturel et identitaire entre la France et le Maghreb.
Ainsi, l’impact de la langue arabe, lexical et phonique, et les traces du langage parlé, lexicales et phonosyntaxiques, mettent-ils en évidence comment la langue est un facteur à même de révéler l’origine ethnique et le statut social du locuteur. L’usage des termes vulgaires, grossiers, contraires aux bienséances est imposé par le statut social des locuteurs issus des classes défavorisées.

Des termes relevant de l’argot sont nombreux. En effet, l’argot qui désignait dans le passé le langage des malfaiteurs, s’est intégré au langage populaire. Son usage dans le roman beur répond à un désir des beurs de se solidariser et de se défendre contre la société qui les rejette. L’argot est le langage préféré par les jeunes notamment dans les écoles.

Mahdi Charef, Le Harki de Meriem
Faïza Guène, Kiffe Kiffe demain
Azouz Begag, Le gone du Chaaba

2) La chanson

Renaud Séchan dit Renaud est un chanteur populaire français né à Paris le 11 mai 1952Renaud est un des chanteurs les plus populaires en France. Dans ses chansons, il mêle révolte, tendresse, et humour pour critiquer la société, rendre hommage ou tout simplement se marrer, le tout avec un langage très personnel où l'argot tient une bonne place.
C'est à l'âge de 16 ans que Renaud écrit ses premières chansons qu'il chante dans des cafés-théâtres et lors des manifestations de mai 68 . Dès 1973, Michel Pons, accordéoniste, l'accompagne, mais ce n'est qu'à la fin des années 1970 que sa carrière démarre vraiment, grâce à "Laisse béton".

http://www.youtube.com/watch?v=iC5eMh1FuaU


3) Le cinéma

Dans les films de banlieue l´importance de la parole se trouve dans l´idée fondamentale de donnes une voix à la jeunesse de banlieue. De cette façon il est impératif d´employer la langue argotique de la banlieue. Ce qui frappe surtout c´est le dégrée de violence verbale des échanges. Le langage des cités est justement un langage plain d´insultes non littérales. C´est le ton et la situation qui font que certains mots, notamment les insultes, soient complètement banalisés et vidés de leur sens. C´est donc une sorte d´agressivité de façade.
Les sujets les plus traités dans ces filmes sont la drogue et la violence, la brutalité de la police, l´ennui, le chômage ou l´identité et le racisme.

http://www.youtube.com/watch?v=mKx9DBfS2A4







PROCEDES À LA BASE D´UN CODE CONVENTIONNEL

Nous traitons ici de la néologie qui obéit à une clé donnée qui change la forme des mots. Il ne s´agit pas de lexiques, sauf en ce qui concerne le verlan, bien que certains formation puissent enter dans les dictionnaires.

1. Le largonji
C´est un type de formation lexicale par lequel on substitue l à la consonne ou au groupe consonantique initial –ou à la consonne suivante si la première est un l ou une voyelle : Olérapem, Opéra. Cette consonne initiale sera rejetée à la fin du mot sans suffixe : J-argon > l-argon-ji.
Ce type d´anagramme a cessé d´être créateur, et il n´en est resté que des mots, qu´on a parfois déformés (quarant > larante deviendra latqué et laranque)


2. Loucherbem

Le loucherbem ou louchébèm (e) (appelé aussi largonji et largonjem) des bouchers de la Villette (à Paris), date de la seconde moitié du XIX siècle, parce qu´il a été attesté en 1867, et qu´il a été en usage jusqu´en 1914 environ (Esnault). Il s´agit d´un code qui change la forme des mots courants au moyen d´un anagramme qui rejette la consonne initiale à la fin du mot, où l´on ajout le suffixe – em. Le nom du parler n´en est qu´un exemple.

3. Le javanais

Il a été attesté en 1857 par Esnault. Selon l´auteur cité, il s´agit d´une insertion du groupe –av- devant chaque syllabe de mots du français courant (pravise <>gravelle, grêle = embêtement », et même du largonji : lavoutravé, loutré = trou. L´étymologie proposée par ce lexicographe rattache cette déformation « au lien de j´ai et j´avais, de ils ont et nous avons ». Il ajoute que : La rapprochement avec l´île de Java a fourni le suffixe –nais.

4. Le cadogan

Il est attesté dès 1896. Il consiste à intercaler l´infixe –dg- (graphié parfois –dgu-) après chaque voyelle, qui est en plus redoublée : Bondguon, bon, beaudgueau, beau, jedgue t´aidguaimedgue !, je t´aime . Son étymon serait cadogan, nom d´une coiffure en 1866, comme le dit Esnault.

5. Le zéral

C´est une déformation du mot par la substitution de –al aux finale en : -aux, -eaux, -ots, -os. Par exemple : boulal (boulots), drapal (drapeaux) , crapal (crapauds). On l´entend abusivement à des mots au singulier : pal (peau).
Il est attesté en 1894, dans le langage des étudiants de Polytechnique, où zéral (et ses variantes : zeral, zéroul, zouroul) signifient zéro.

6. Le verlan

Le terme qui désigne ce procédé est d´origine argotique : c´est la métathèse de « (à) l´envers », et il est appelé ainsi par le retournement des mots qui le caractérise. Cependant, on ne peut pas tout inverser, seules certaines formations sont admises (Andreini, 1985). Obalk remarque que « chacune des parties du terme est traitée séparément : chela pour lâche et oim pour moi [dans chelaoim] ».
Ce qui était au début un code est devenu un vrai lexique : « un mot souvent codé finit par se lexicaliser, par se cristalliser dans sa forme secrète » (Guiraud, 1985).
Même s´il existait déjà dans l´argot de la pègre au XIX siècle, ce phénomène est devenu à la mode « dès la fin des années 70 », chez les jeunes, et notamment chez les Branchés, les Babas hard et même chez les Minets qui écoutaient le chanteur Renaud. Les écoliers, les universitaires, ainsi que les jeunes des banlieues s´en servaient à profusion. Cependant, certains lycéennes le trouvent grossier.
Le verlan ne constitue qu´un des procédés dont se servent les langages des jeunes pour la création de mots. Le reste est formé au moyen de procédés qui donnent lieu aux « parlers branchés », comme les nomme Denis François, qui font souvent apparaître un « néo-verlan approximatif (ex. koef pour « flic ») ». Branché a ici le sens qui lui donne Pierre Merle : « A la mode, dans le vent ».

PROCEDES LEXICAUX ET STYLISTIQUES


Ayant constamment besoin de se renouveler, tout argot se sert d’un nombre considérable de procédés de formation. Il s’agit des procédés fonctionnant à la base de la formation lexicale et des procédés stylistiques.
Les procédés lexicaux: troncation (apocope et aphérèse), suffixation déformatrice, resuffixation, composition, redoublement et d’autres procédés.
Il existe des argots qui ont été créés par utilisation d’un code conventionnel. Ce sont, par exemple, les argots appelés: largonji, louchébem, javanais, verlan, cadogan.
En ce qui concerne les procédés stylistiques, l’un des modes fréquents de formation d’unités nouvelles est directement lié à ce que R. Jacobson appelle la fonction poétique du langage. Il consiste à nommer un objet par une de ses caractéristiques, le plus souvent par métaphore, métonymie et synecdoque.
Il y a bien d’autres façons de formation telles que substitution synonymique, utilisation des images, analogie, euphémismes, emprunts aux dialectes, à la terminologie, aux langues étrangères, notamment de l´anglais (franglais) et de l´arabe.
Ce qui caractérise le plus nettement l’argot c’est sa tendance à altérer et à déformer les mots. Tous les procédés de déformation argotique se rattachent à des phénomènes normaux du langage que l’argot n’a fait que développer et hypertrophier.

1. Parmi les procédés lexicaux les plus fréquents se trouve la troncation qui est souvent résultat de ce qu’on appelle «économie de l’expression». L’argot, langage parlé, opère avec des vocables plus ou moins amputés d’une partie de leurs syllabes. On le voit aussi dans le langage familier où on dit métro, taxi, météo, télé, anniv, mez, foot, plez...
On distingue deux sortes de troncation – apocope, consistant en suppression de syllabe/s/ à la fin d’un mot (artiche – apocope d’artichaut, tac – apocope de taxi, bouille – bouillotte) et aphérèse, qui se montre par chute d’un phonème ou d’un groupe de phonèmes au début d’un mot (acré – aphérèse de sacré, boche – alboche, gnard – mignard, loute – louloute, ricain – américain, troquet – mastroquet).
Le mot peut être modifié par plusieurs procédés à la fois, par exemple : troncation et resuffixation (calcif = caleçon + -if, derche = derrière + -che, alcoolo = alcoolique + -o, Amerlo = Américain + -o, burlingue = bureau + -lingue, calbar = caleçon + -bar, morcif = morceau + -if) aphérèse et redoublement (zizique – de musique, doudoune – de bedoune) ou apocope et jeu de mots (bouc – de bookmaker).
La dérivation est, en français, un des moyens privilégiés de renouvellement du lexique.
D’abord l’argot se sert des suffixes populaires avec leur valeur courante, si bien qu’on ne peut distinguer ces formations de celles du langage populaire. Mais il ne s’est pas contenté seulement des suffixes courants et il en a créé de nouveaux, les uns par généralisation des finales, les autres par renforcement de suffixes. L’argot a développé ces deux procédés dans des proportions insolites.
Bien plus souvent il se sert des suffixes pour altérer la forme des mots, sans en
changer le sens (suffixes déformateurs), par ex. aminche – ami, boutanche –
bouteille, cravetouse – cravate, calmos – calme, fastoche – facile, dirlo – directeur, escadrin – escalier, frangin, frelot – frère, vioque – vieux, etc.
En français il y a une grande variété de suffixes utilisés pour former ou déformer une expression, par exemple les suffixes à une valeur péjorative -ard,-asse /connard, m. – con, peinard, m. – peine, connasse, f. – con, vinasse, f. –vin/, les suffixes -ingue /salingue, n. et adj. – sale/, -aille /flicaille, f. – flic/,-iche /bonniche, f. – bonne/, -oche /baloche, m. – bal/, – ouille /pedzouille, f. –paysan, pézan/, -ton /paveton, m. – pavé/, des suffixes verbaux, fantaisistes nana, f. – Anne/.

Le procédé de substantivation des adjectifs, ainsi que la dérivation régressive, sont aussi fréquents : (tapin, m. – taper, turbin, m. – turbiner, dorme,f. – dormir, tocante, f. – toquer) ainsi que le procédé inverse /verbes créés à labase des noms/ : becter – bec, coffrer – coffre, croûter – croûte,
/se/ gaffer – gaffe
Il est naturel, en dérivant des mots, que l’argot se serve, à côté des nombreux suffixes, des préfixes en-, dé- /enculer = en- + cul, délourder = dé- + lourde/.
Un autre procédé lexical productif est la composition qui se fait à partir d’éléments autonomes, déjà intégrés dans la langue.

a) mots composés soudés
éconocroques, f. pl. – de économies et de croquer
/se/ carapater, v. – de se carrer et de patte
b) mots composés liés par un trait d’union
claque-merde, m. – de claquer et de merde
coupe-cigare, m. – de couper et de cigare
c) mots composés liés par une préposition
monte-en-l’air, m. – de monter et de air avec la préposition en interposée
saute-au-paf, f. – de sauter et de paf avec la préposition à.

Un procédé, en faveur chez les peuples primitifs, et spécial, de nos jours, au langage enfantin est le redoublement. C’est de là qu’il s’est réintroduit dans la langue générale par la voie d’appellations enfantines (bonbon, joujou,...), ainsi que dans la langue populaire et familière. Des mots avec redoublement ont été apportés en français surtout par les Arabes, Sénégalais, etc.
bobonne, f. – redoublement expressif (de bonne)
dodo,m. – redoublement expressif (de dormir)
gogo, m. – redoublement expressif (de gobeur ou de nigaud)
bobo, m. – redoublement de bosse
Un autre procédé de formation repose sur l’imitation des sons. C’est une création essentiellement auditive. Les mots créés de cette façon-ci sont appelés les onomatopées (bouffer, briffer, chialer, craquer, faf, jaser, loufiat, paf, roupiller).

2) En ce qui concerne les procédés de formation stylistiques, les changements sémantiques sont parfois si rapides, surtout à l’époque contemporaine, qu’on ne peut pas souvent reconstituer les étapes précédentes du développement de sens.

Bien des créations restent encore mystérieuses pour nous, car nous ignorons les circonstances qui ont provoqué leur naissance.
On a constaté un renouvellement constant des termes argotiques qui sont rapidement usés. C’est ce qui explique l’importante polysémie et l’importante synonymie. En argot français, lansquiner signifie à la fois «pleuvoir» et «pleurer », le verbe se taper sert à désigner l’action de «manger» de même que le fait de «posséder sexuellement.
L’argot offre des gammes de synonymes pour désigner des objets et êtres précis, par exemple au lieu du verbe s’en aller on peut employer les synonymes se barrer, se casser, s’esbigner, s’évaporer, foutre le camp, mettre les bouts, se tailler, se tirer; au lieu du substantif argent les mots l’artiche, le blé, les boules, le flouze, le fric, le plâtre.
La richesse synonymique de l’argot s’explique par le caractère essentiellement émotif de ce langage; elle est aussi en fonction directe de son renouvellement rapide.

La métaphore, appartenant aux forces principales créatrices des langages argotiques ainsi que des parlers populaires, évoque un objet concret par une autre image concrète, en mettant en valeur une propriété, souvent pas essentielle, mais expressive. Très vivantes et expressives sont surtout les métaphores qui désignent un objet par le nom d’un autre, à cause d’une similitude de forme (choux pour désigner, la tête,; flûtes pour désigner les jambes), de couleur (être vert est une expression d’après la frayeur qui fait verdir; plâtre pour désigner l’argent), de fonctionnement (bouillotte pour désigner une locomotive à vapeur), ou, enfin, par analogie d’une qualité physique (châssis pour désigner l’oeil ou les lunettes à cause de l’idée de transparence; coton pour désigner le fait d’être difficile, compliqué à cause de l’idée de mollesse, d’épaisseur),etc.
Certaines métaphores mettent en lumière les croyances populaires relatives à la psychologie des animaux : vache, adj. – se dit d’un individu ou d’un comportement inspiré par la méchanceté, l’hostilité.

La métonymie est, comme métaphore, une des figures de rhétoriques qui occupe une place importante parmi les procédés de formation. Métonymie naît si l’on prend le nom de la cause pour désigner l’effet, le contenant pour le contenu, le signe pour la chose signifiée ... Ainsi le mot de croûte signifie le plus souvent nourriture ou repas. Une autre sorte de synecdoque (la matière pour l’individu) se montre dans l’utilisation du mot de viande – corps humain, individu.

Dans l’argot, les noms propres occupent une place particulière. La désignation d’un produit par son origine ou par son inventeur, aussi bien que la désignation des événements par le lieu où ils se sont produits, sont courantes dans toutes les langues. Exemple : bigophone – téléphone (de Bigot, nom de l’inventeur d’un instrument de musique en carton), godillot – gros soulier (du nom d’A. Godillot, inventeur d’une chaussure militaire à tige courte), godasse – gros soulier (de godillot, resuffixation péjorative), nana – prostituée; maîtresse; fille ou femme en général (diminutif d’Anne, popularisé par le roman de Zola Nana), zigoto – individu douteux, incapable ou excentrique (issu de Zigomar, titre d’un roman de Léon Sazie).

DÉFINITIONS




L’argot, en tant qu’un inventaire du lexique, existe depuis plusieurs siècles sous différentes formes et se produit de diverses manières. Il est difficile de tracer les limites de l’argot moderne: on y voit apparaître sans cesse de nouveaux mots, de nouveaux procédés de création mais, surtout, ces néologismes passent très vite dans le langage général et là, le vocabulaire d’origine argotique est souvent tout à fait assimilé par la langue commune. On pourrait penser que cette rapidité de circulation est le résultat de cette publicité: dès lors qu’un langage «secret» est connu, il doit changer. Mais l’argot moderne n’est plus vraiment un langage secret, il est plutôt un des éléments dans la palette de choix dont dispose le locuteur. Lorsque l’argot est présent à la radio, à la télévision ou au cinéma, il est utilisé dans la publicité, son statut s’en trouve nécessairement modifié. Certains emploient, pour suivre la mode, des mots argotiques qu’ils découvrent grâce aux médias. D’autres, qui ont créé ces mots vont en créer d’autres pour maintenir la distance entre leur groupe et ses imitateurs.
On voit que le passage entre l’argot et la langue est très flou et qu’il est impossible de le tracer de façon nette. C’est pour cette raison qu’on peut trouver de nombreuses définitions de l’argot et diverses approches de cette problématique:
largot, pour Dauzat, au sens étroit du mot, est le langage des malfaiteurs.
Par extension, il peut désigner aussi, selon lui, un certain nombre de langages spéciaux qui offrent des traits communs avec le précédent. Dauzat a adopté ici presque la même opinion qui avait été prononcée par Littré en 1863 (langage particulier aux vagabonds, aux mendiants, aux voleurs, et, par extension, phraséologie particulière dont se servent entre eux les gens exerçant le même art et la même profession). Esnault considère l’argot comme l’ensemble oral des mots non techniques qui plaisent à un groupe social. À l’argot employé soit comme une langue secrète (voir l’opinion des auteurs ci-dessus), soit comme un signe de reconnaissance (par ex. langage des étudiants) est encore attribué, par Bonnard, le sens de langue triviale, partie la plus vulgaire du lexique populaire, connue et comprise dans toutes les couches sociales. D’autres linguistes distinguent l’argot des langues spéciales appelées jargons qui ne sont pas des langues secrètes
mais plutôt des langues de métiers. D’après Calvet l’argot est devenu une façon de se situer par rapport à la norme linguistique et du même coup par rapport à la société.
En tenant compte des opinions citées, il serait possible de résumer que l’argot, d’abord essentiellement cryptique, a conservé cette fonction fondatrice de cacher dans certaines situations, tendant à limiter la communication à un cercle d’initiés. En même temps le vocabulaire argotique est assimilé par la langue commune et, exploité au quotidien et compris de tous, conserve simplement des connotations «vulgaire» ou «populaire».
Il faut prendre en considération que l’argot a parcouru, pendant les siècles, un long chemin d’évolution et qu’il a considérablement influencé la langue commune, normale, et, dans certains cas, a pénétré dans les autres niveaux de la langue: par le français populaire et familier jusqu’au français littéraire. Avec ce long parcours des registres les plus „bas“ aux niveaux d’un prestige social plus grand, certaines expressions et leurs sens ont subi des changements remarquables.
Ce lexique peut apparaître dans presque tous les domaines, même dans des textes écrits, dans des romans ou dans des articles de presse, quoiqu’il s’agisse, à l’origine, des expressions propres à la forme parlée de la langue.

L’utilisation des éléments argotiques est parfois causée par l’état immédiat de l’usager, qui veut exprimer sa colère, son refus ou son dédain. En même temps il existe toujours, même pour les locuteurs nés, mais non-initiés (dans le sens rappelé au-dessus), un lexique très peu compréhensible, disons celui qui n’a pas encore eu le temps et les conditions favorables pour prendre une place solide dans le niveau du français commun, mais aussi celui dont les éléments sont déjà généralement connus et fréquemment utilisés par la plupart des habitants de la France et des francophones et l’origine n’en est plus claire pour les usagers.
Prenons, à titre d’exemple, quelques mots employés souvent dans la vie quotidienne:

1. Fric, n. m.
C’est un nom masculin équivalent au substantif du français standard argent.
D’après le Dictionnaire de l’argot (1992) ce mot est issu de fricot, fricasser, c’est-à-dire cuire dans leur jus des aliments. Il s’agit donc de métaphore d’un verbe culinaire.
On trouve déjà le mot fric comme synonyme d’argent dans le Dictionnaire Français-Argot d’Aristide Bruant publié en 1905. D’après le Dictionnaire Etymologique d’Albert Dauzat1 (1938) ce n’est qu’au début du XXe siècle qu’on commence à introduire dans la langue le mot fric au sens de l’argent. Chez Dauzat, ainsi que chez les auteurs du Dictionnaire du français vivant12 (1957) et de Larousse (1993), ce mot est caractérisé comme «argotique». Le Nouveau Petit Robert de 1994 le considère déjà comme familier. Nous voyons donc que l’expression fric qui, avant l’an 1900, n’existait probablement pas au sens de l’argent, a fait un long chemin au cours du XXe siècle. Aujourd’hui il est généralement connu et utilisé dans la vie quotidienne.

2. Flic, n. m.
Voici quelques exemples tirés des émissions télévisées :
«J’étais avec un collègue à vous. Un flic, comme vous.» TF1 – Navarro
«Il n’avait pas encore engagé de flics.» TF1 – Sunset Beach
«...un flic sans moralité, et c’est un criminel en plus.» RTL 9
«Je suis pas flic, je suis pompier.» RTL 9
«Je suis flic; un flic un peu spécial.» TF1 – film Un flic presque parfait

Ce mot est d’origine allemande. Il vient du mot Fliege, mouche, c’est-à- dire
policier.
Aujourd’hui le mot flic désigne un membre de la police ou de la gendarmerie.
Chez Bruant nous pouvons trouver ces variations du mot : flic, flicadart, flicard, flick, flique.
D’après le Dictionnaire Etymologique ce mot, d’abord argotique, ensuite populaire, existait depuis longtemps dans la langue. Le Dictionnaire du français vivant, ainsi que Le Robert accompagnent le mot flic de l’indication familier et péjoratif, et Larousse le considère comme populaire.